By Roger T. Duguay
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Aujourd’hui, nous utilisons notre téléphone comme une télécommande. Ce qui n’attire pas l’oeil en moins de deux secondes est immédiatement balayé, zappé d’un simple revers de pouce.

Nous vivons dans un monde en déficit d’attention. On ne parle plus de présentation mais d’Elevator Pitch. Cette tyrannie de l’instantanéité nous oblige à repenser notre façon de communiquer, de marquer les esprits.

Pourtant, même si la société évolue, l’humain lui ne change pas. Dans les rapports sociaux comme dans les enjeux de pouvoir, l’apparence a depuis toujours occupé une place importante. Louis XIV n’a pas été surnommé le Roi-Soleil pour rien. Nombreux sont les monarques qui ont compris qu’une image maîtrisée peut avoir une influence considérable sur la capacité à mener à bien de grands projets.

L’image : des grottes aux tabloïdes

Historiquement, l’exercice de la peinture visait à reproduire le plus fidèlement possible le réel. Les dessins présents dans les grottes de Lascaux sont une belle illustration de l’instinct que l’être humain possède d’immortaliser ce qu’il voit, de le transmettre. Plus tard, l’invention de la photographie a permis une reproduction exacte de la réalité. L’image devenait alors reproductible et transmissible en vue d’une large diffusion.

La révolution numérique qui a débuté à la fin du XXème siècle a complètement bousculé notre relation à l’image. Ce raz-de-marée digital a rendu obsolète les technologies courantes de captation et de reproduction. Les images retouchées par la magie des applications de type Photoshop sont devenues la norme.

La couverture de l’édition du mois de Mars 2017 du magazine VOGUE en est une belle représentation. Alors que l’on est en droit de penser que ces femmes ne doivent pas avoir grand-chose à retoucher, comment se fait-il que le mannequin plus size Ashley Graham soit présentée avec des courbes considérablement amincies ? de plus, pourquoi allonger à outrance le bras gauche de Gigi Hadid (au centre) lui donnant l’air de posséder un bras d’une longueur démesurée ? 

La véritable question est celle-ci : l’auriez-vous remarqué par vous-même si je ne vous l’avais pas montré ? Probablement pas, et c’est bien normal. Facebook, Instagram, Pinterest ; du matin au soir, nous sommes bombardés d’images retouchées et à force d’habitude, notre vigilance tend à baisser.

La force des apparences

Dans ce monde où il est possible de fabriquer et projeter l’image que l’on souhaite, nous devenons de moins en moins tolérant lorsqu’une image projetée ne correspond pas à nos attentes. 

Lorsque l’on élit un ministre de la santé, on s’attend inconsciemment à ce que ce dernier incarne un certain idéal physique. Lorsque le Docteur Gaëtan Barrette (Québec) ou Maggie De Block (Belgique), deux personnes souffrant d’obésité, ont été nommés ministres de la santé, l’opinion publique de leur pays respectif s’est déchainée. Le débat n’a pas porté sur leur compétence ou leur légitimité professionnelle, mais sur l’image projetée par leur physique.

Une telle polémique, bien qu’elle soit fortement regrettable, nous fait prendre conscience que nous avons tendance à porter des jugements toujours plus rapides, en nous basant sur ce que l’on voit plus que ce que l’on sait.

« On examine avec soin les objets dans les boutiques, mais quand il s’agit de gens, on les juge sur l’apparence ». Aristippe de Cyrène

Nous vivons à l’ère de la mentalité iPad. Notre aptitude à capter l’attention des autres, dans le but de laisser la bonne impression, revêt donc d’une importance croissance. Nous devons apprendre à gérer notre image, car les gens ont de moins en moins de temps pour se faire une idée sur notre véritable identité.

À un cheveu de la réussite

Je vais vous faire une confidence, je n’ai pas toujours porté de complets-cravates.

Adolescent et mordu de musique, mon allure n’était pas celle d’un élève modèle, mais bien celle d’un rocker aux cheveux long et aux vestes de cuir cloutées. Bien que conscient des remarques et des préjugés que je générais, j’ai pris un malin plaisir à en rajouter pour mieux afficher mon image de rebelle jusqu’à la fin de mes études universitaires. Je voulais prouver qu’il était possible de s’écarter de la norme tout en excellant dans les différentes facettes de sa vie.

À la dernière session universitaire de mon baccalauréat en actuariat, je suis parti en quête de mon premier emploi. J’ai compris assez vite que mon apparence allait jouer un grand rôle dans ma capacité à obtenir un bon emploi. Dans le cadre d’un processus de recrutement, les candidatures sont nombreuses. Il me fallait trouver un moyen d’aider le recruteur à percevoir dans mon profil les compétences qui correspondait à ce qu’il cherchait. Me battre contre les préjugés était peine perdue.

L’achat d’un premier complet, un rapide passage chez le coiffeur et une fausse paire de lunette m’ont permis de me présenter en entrevue conformément aux attentes du secteur de l’actuariat, reconnu pour son conservatisme. Je fus parmi les 7 gradués de mon année (sur 69 gradués et 220 étudiants qui avaient commencé le programme 3 ans plus tôt) à sécuriser un emploi avant la fin de la session.

Ce compromis m’a permis de décrocher mon emploi et de me réaliser par la suite tout au long de ma carrière. Je n’ai pas pour autant cessé mon combat contre les stéréotypes ou les jugements hâtifs. Même avec les cheveux courts, je suis resté qui je suis, avec mes opinions et ma façon d’être.

J’ai tout simplement réalisé que pour atteindre ses objectifs d’affaires il est essentiel de comprendre les règles du jeu.

Ce jeu de l’image est différent pour chaque industrie, chaque entreprise. Comprendre ses mécanismes, c’est mettre plus de chances de son côté pour accélérer son développement professionnel et parvenir à ses fins.

 

Originally published on LinkedIn.

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